La surperformance des marchés émergents depuis l’été a quelque peu surpris les investisseurs. Assiste-t-on a un énième «faux départ» ou s’agit-il du début d’un nouveau cycle?
Les quatorze dernières années de sous-performance des marchés émergents reflètent en réalité la surperformance des États-Unis par rapport au reste du monde. Durant cette période, la rentabilité des fonds propres aux États-Unis a été supérieure, ce qui s’est traduit par des multiples de valorisation plus élevés. On pourrait dès lors reformuler votre question initiale par: «Quels facteurs pourraient mettre fin à l’exceptionnalisme américain?»!
Nous constatons que les conditions d’un point d’inflexion sont réunies depuis un certain temps déjà. Les États-Unis affichent un «double déficit» (commercial et budgétaire) important. Le dollar, qui évolue généralement selon des cycles longs, s’apprécie depuis un certain temps déjà. De plus, les investisseurs internationaux sont très exposés aux actifs américains. Le principal catalyseur d’un nouveau cycle de marché pourrait bien être l’orientation politique de l’administration actuelle, qui commence à saper bon nombre des facteurs qui ont soutenu le succès des États-Unis durant ces dernières années.
On cite souvent la baisse du dollar US comme le principal facteur de soutien aux marchés émergents. Est-ce toujours vraiou y a-t-il d’autres facteurs qui entrent en ligne désormais?
Le dollar américain a une incidence majeure sur les conditions financières dans les marchés émergents. Sur un horizon de deux à trois ans, notre scénario de base reste celui d’un affaiblissement du dollar, même si nous sommes conscients du risque d’un répit à court terme compte tenu de l’ampleur de la baisse du dollar cette année et de la vigueur actuelle du marché boursier américain, soutenue par l’intelligence artificielle.
Les conditions monétaires sont également favorables. La Réserve fédérale américaine a commencé à réduire ses taux. Les pressions inflationnistes dans les marchés émergents se sont atténuées, aidées par la baisse des prix des matières premières et le raffermissement des devises, et les taux réels dans les marchés émergents sont globalement positifs, ce qui donne aux banques centrales émergentes une marge de manœuvre pour assouplir leur politique.
Il y a une grande disparité parmi les marchés émergents. Il y a encore peu, la Chine était considérée comme «non-investissable» par certains investisseurs. Comment Schroders évalue-t-elle l’attractivité de ces différents marchés?
Schroders n’a jamais considéré la Chine comme un marché non investissable! Ces dernières années, la reprise économique anémique post-Covid et les tensions persistantes sur le marché immobilier, combinées à l’activité réglementaire continue et aux tensions entre les États-Unis et la Chine, ont créé un environnement difficile. Cependant, dans un pays aussi vaste et dynamique que la Chine, il y aura toujours des opportunités d’investissement intéressantes.
Schroders utilise un modèle de classement multifactoriel propriétaire, complété par notre propre jugement, pour évaluer l’attractivité relative des différents marchés boursiers émergents. Aujourd’hui, nous surpondérons légèrement la Chine, mais nos choix tactiques privilégient le Brésil et Taïwan, au détriment de l’Inde et de l’Arabie Saoudite.